Réunies devant une juridiction de San Francisco, les deux parties s’opposent sur une vieille affaire de prix de transfert datant de 2010. Au-delà du montant astronomique en jeu, cette décision pourrait rester dans les annales en inaugurant une jurisprudence nouvelle sur le sol américain.

Les faits ressemblent à s’y méprendre à un cas d’école. Facebook, dans le cadre de son activité courante, a procédé à un transfert de propriété industrielle au profit de l’une de ses filiales irlandaises en 2010. En contrepartie, cette dernière lui a logiquement versé une rémunération, intégrée au résultat imposable de la holding américaine. Voilà, à peu de choses près, ce sur quoi l’IRS et Facebook s’accordent aujourd’hui. Pour le reste, deux thèses s’affrontent depuis le début de l'audience le 18 février. Pour le fisc américain, le groupe de Mark Zuckerberg aurait délibérément minimiser le prix des licences de propriété intellectuelle transférées en Irlande afin de réduire son impôt aux États-Unis. Alors que Facebook les a valorisées 7 milliards de dollars, l’administration fiscale estime qu’elles coûtaient en réalité 21 milliards de dollars. Une sous-évaluation qui représenterait un manque à gagner de 9 milliards de dollars pour l’IRS. Facebook, de son côté, avance avoir au contraire surestimé la valeur de ces technologies, conduisant ainsi la firme à payer trop d’impôts.

Revirement de jurisprudence ?

C’est donc la question de la valorisation de ces actifs incorporels que la United States Tax Court, la juridiction américaine spécialisée dans le traitement des affaires fiscales est chargée d'examiner. Si chaque partie affichait une confiance de façade, se disant pressée de défendre ses argument, la décision est particulièrement attendue. En reprenant à son compte l’argumentaire du fisc, la justice ferait montre d’une rigueur nouvelle quant contrôle de la pratique, généralisée chez les géants de la tech, des prix de transfert. Difficile cependant de deviner le contenu du verdict qui, à en croire la presse américaine, ne devrait pas intervenir avant plusieurs semaines au regard des nombreuses auditions prévues. Les pessimistes avanceront le « précédent Amazon ». Poursuivi, au cours de l’été 2019 pour des faits similaires, le spécialiste du e-commerce avait finalement eu gain de cause. Les optimistes, eux, feront valoir que ces derniers mois le sujet de l’imposition des GAFA occupe le devant de la scène. Que ce soit au sein de l’Union européenne ou de l’OCDE qui mûrit actuellement un accord sur la taxation des entreprises du numérique et des multinationales. Ironie de l’histoire, Mark Zuckerberg s’est lui-même dit favorable à cette réforme.

Sybille Vié

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