Mardi 11 juin se tenait la deuxième édition de M&A Stories rassemblant plus de 200 participants. Débats, conférences, échanges, dans un climat de confiance ont offert la mesure d’une symphonie pleine d’informations, de conseils et de retours d’expériences aux différents acteurs du monde des fusions-acquisitions. Retour en détail sur l’évènement qui a réuni l’élite du marché M&A.

Jonathan Marsh, président de l'Association française des fusions-acquisitions (Arfa) a commencé par une introduction sur les enjeux des opérations M&A. L’occasion de mettre en avant les vingt ans de l’Arfa fêtés à cette occasion. Les thématiques de cette journée, aussi riches que variées, se sont concentrées notamment sur le contrôle des investissements étrangers et les meilleurs conseils pour surmonter les difficultés liées aux nouveaux paramètres du marché du M&A.

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Le contrôle des investissements étrangers en France (IEF)

Cela ne surprendra personne : la France ressort comme le pays le plus attractif d’Europe pour les investissements étrangers selon le baromètre de l’attractivité de la France réalisé par EY en 2024 (1er mai 2024). Pour rappel, si ces opérations contribuent au dynamisme du marché du M&A en France, elles ne doivent pas, pour autant, porter atteinte aux intérêts nationaux fondamentaux de défense, de sécurité et d’ordre public. Victor Tissandier, adjoint au chef du bureau du contrôle des investissements étrangers en France est ainsi revenu sur l’importance de l’anticipation durant la période d’audit pour ce genre d’opération. "La raison de l’existence de ce régime est la protection de notre souveraineté nationale. Le tout est de trouver un équilibre avec la liberté des investisseurs étrangers", confie-t-il. Etienne Chantrel, associé en charge de l’activité Economic & Regulatory Advisory chez Eight Advisory ajoute que : "Dans la mesure où le contrôle IEF s’exerce a priori, et non pas a posteriori, l’obtention de l’autorisation du ministre de l’Économie (ou, le cas échéant, d’une décision de non-éligibilité) constitue une condition suspensive à la réalisation de l’opération." Le contrôle des concentrations est plutôt rapide lorsqu’il s’agit d’affaires d’anti-trust et les sanctions peuvent s’avérer particulièrement sévères. Afin de se prémunir de prises de participation opportunistes non européennes pouvant présenter des menaces pour la sécurité nationale, le seuil déclenchant le contrôle IEF dans les sociétés françaises cotées a été abaissé de 25 % à 10 % des droits de vote. Trois critères sont donc aujourd’hui retenus : il doit s’agir d’un investissement étranger, dans le cas d’une opération d’acquisition européenne d’une société cotée, préciser que celle-ci a 10 % du droit de vote ainsi que la nature de l’investissement. (Ex : la défense). Victor Tissandier nuance cette idée : "Les décisions d’interdiction formelles sont rares. Le Trésor préfère avoir recours à des demandes approfondies comme des informations complémentaires (ex : document internes, messageries)."

Le contrôle des subventions étrangères

Un nouveau contrôle a vu le jour : celui des subventions étrangères. Anne Toupenay-Schueller associée, Corporate M&A, et Karl Hepp de Sevelinges, managing partner et associée Corporate M&A, au sein du cabinet Jeantet rappellent : "Ce qui est visé par cette réglementation, ce sont les sociétés injustement avantagées à cause de subventions étrangères. Deux cas de figure sont mis en avant : Une entreprise souhaite acquérir une société cible de l’UE. Cette acquisition est soutenue par les pouvoirs publics d’un pays non-membre de l’UE au moyen d’une subvention directe de l’État. Ces subventions permettent à l’acquéreur de financer plus facilement l’acquisition et de surenchérir face aux concurrents potentiels. La seconde situation est celle d’une société qui a l’intention de soumettre une offre dans le cadre d’un appel d’offres public organisé par un pouvoir adjudicateur dans un État membre de l’UE." Celle-ci est soutenue par les pouvoirs publics d’un pays non-membre de l’UE au moyen de subventions directes. Elle est donc en mesure de faire une offre à un prix peu élevé, ce qui n’aurait pas été possible sans la subvention. Les conditions sont les suivantes : "Premièrement, lorsque l’entreprise acquise génère un chiffre d’affaires dans l’UE d’au moins 500 millions d’euros et deuxièmement quand la contribution financière étrangère s’avère au moins égale à 50 millions d’euros", précise Anne Toupenay-Schueller.

Les nouveaux enjeux d’un deal

La Garantie de l’actif et du passif (GAP) fait souvent l’objet de négociations intenses dans le cadre des opérations de M&A. Lucie Bocel, directrice France chez Howden M&A, le courtier leader en Europe dans le domaine des assurances, de la GAP et des risques spéciaux commente : "En France, entre 20 % et 30 % des opérations sont assurées. Cela s’explique notamment par le fait que, culturellement, l’assurance n’a pas bonne réputation en France. Déconstruire ce préjugé prend du temps, convaincre le microcosme M&A français que les assureurs M&A sont fiables encore plus." Là encore, de quoi se prémunir des risques liés notamment au contexte macro-économique incertain. Pour les deals de carve-out, Cédric Zana, Managing Director d’Alvarez et Marsal est revenu sur l’importance de bien s’entourer : "Il faut bien sûr des leaders, des personnalités de confiance, charismatiques, qui croient à la réussite de cette opération et qui dégagent une forme de sérénité. Lorsque les salariés s’interrogent, il faut être en mesure de pouvoir raconter une belle histoire et de répondre à leurs interrogations."

Soft Skills : les conseils pratiques

L’événement a été également l’occasion de mettre en avant l’une des préoccupations majeures dans le monde du M&A : à savoir la gestion du stress. Et pour cause ! La notation extra-financière, la data, la compliance, la CSRD alimentent cet état de tension, puisqu’il s’agit de nouveaux paramètres à prendre en considération lors des opérations de M&A. Il convient de s’initier à l’ensemble de ces données et faire un retour sur l’appréciation du risque. Cela explique que les due diligences prennent plus de temps. Dans ce contexte, quel est le secret d’une opération de M&A réussie ? Diversité des profils d’une même équipe avec une bonne résistance au stress. Les intervenants ont ainsi rappelé l’importance des rapports humains et de la communication pour augmenter ses chances réussir des opérations de M&A. Jean-Benoît Demaret, avocat à la Cour chez Bredin Prat rappelle qu’"il ne faut pas oublier que lors d’une acquisition, vous achetez le savoir-faire d’hommes et de femmes. Il faut donc s’armer d’humilité et instaurer un réel dialogue car l’intégration est la partie la plus difficile et la plus importante. Tout cela s’anticipe et se travaille en amont."

L’IA et le M&A

L’IA prend de plus en plus de place lors d’opérations de M&A. La confidentialité des données et la conformité des opérations à la réglementation RGPD demeure un enjeu majeur. Sandrine Talbot chez Drooms nous a expliqué les bienfaits de l’IA dans ces transactions : "Nous avons un traitement des données plus rapide. Nous pouvons donc nous attarder sur des phases plus importantes à forte valeur ajoutée, tout en assurant l’élimination des erreurs humaines grâce aux solutions de l’IA." Petite nuance et non des moindres : "L’inconvénient, c’est que nous pouvons assister à un problème de formation des futures générations étant donné que l’IA peut les remplacer sur certaines tâches pourtant importantes et nécessaires en début de carrière."

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Plénière de clôture : Comment surmonter les difficultés ?

La direction M&A demande beaucoup d’énergie pour embarquer toutes les équipes et maintenir la motivation. À cet égard, Rémy Boulesteix Partner Head of Advisory chez KPMG poursuit cette réflexion : "Le M&A est un sport d’équipe au sens large qui permet d’être résilient. Face à un monde qui change par l’arrivée d’une réglementation européenne avec la CSRD et de l’IA, il est nécessaire de s’adapter." Noémie Assenat Global Head of M&A chez Michelin ajoute qu’ "il faut aussi savoir véhiculer une énergie positive et collective." Une qualité recherchée que se doit d’avoir la personne aux commandes d’une « Post Merger intégration » ; étape cruciale dans la réussite de l’opération. Apprendre à tirer le meilleur parti de la transition et du plan d’intégration est capital, car il faut bien le reconnaître, la direction M&A navigue entre vents et marées. Dans ce contexte, les thématiques ont su captiver l’attention de l’auditoire.

Laura Guetta Dray

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