Didier Bouvignies et Philippe Chaumel : « La Chine n’a pas d’intérêt à déprécier trop fortement son taux de change »
Décideurs. Les marchés boursiers ont connu un début d’année 2016 mouvementé. Comment expliquer de telles difficultés ?
Didier Bouvignies et Philippe Chaumel. Elles peuvent être interprétées comme la conséquence de trois inquiétudes. La première concerne la situation de la Chine. Les marchés redoutent que ce pays s’engage dans une guerre des changes. Le pivot de parité de change par rapport au yuan s’est fortement écarté en fin d’année 2015. Une situation qui fait craindre un risque de dépréciation accéléré du yuan par rapport au dollar. En parallèle, nous n’avons pas rencontré de dégradation évidente sur l’économie chinoise. Les statistiques publiées sur l’immobilier et l’immatriculation automobile se sont même montrées rassurantes. Il est vrai que la Chine doit faire face à des sorties de capitaux importantes, les réserves de changes ayant baissé de 400 milliards d’euros en une seule année. Rappelons-nous toutefois que l’objectif de la Chine est de réorienter son économie vers une activité de service. Or, pour parvenir à cette fin, elle n’a pas d’intérêt à aller sur une dépréciation trop rapide et prononcée de son taux de change. Celle-ci aurait en effet pour conséquence de recréer des capacités industrielles qui sont déjà mal employées et peu rentables. C’est pourquoi nous pensons que la solution de la dévaluation monétaire ne devrait pas être retenue.
La seconde crainte entoure la chute du prix du baril de pétrole et des matières premières. L’offre de pétrole a continué de s’accroître aux USA mais aussi et surtout au sein de l’Opep. L’Arabie saoudite joue un jeu politique dangereux visant à s’engager dans une lutte de parts de marché face à l’Iran, de retour sur le marché après la fin de son embargo, et l’Irak dont la production s’est accélérée. En 2016, nous devrions, à notre sens, connaître un meilleur équilibre sur ce marché grâce notamment à la baisse de la production américaine et une possible inflexion de la politique de l’Opep. Enfin, les craintes d’un ralentissement de la croissance aux USA sont toujours de nature à inquiéter les investisseurs.
Propos recueillis par Aurélien Florin
Retrouvez la suite de cet entretien dans l'édition 2016 du supplément « Gestion de patrimoine & gestion d'actifs » de Décideurs Magazine