Le gouvernement ne s’est pas encore saisi des questions relatives à la transmission. Un enjeu qui est pourtant crucial pour maintenir l’attractivité de la France et de ses entreprises.

La présentation du budget 2018 par le gouvernement le 27 septembre dernier a confirmé les dernières déclarations d’Emmanuel Macron pendant sa campagne concernant les droits de succession : pas de changement à prévoir. Le cap n’était pourtant pas si certain. En tant que ministre de l’Économie, il expliquait en mars 2016 dans la revue Risques, Les cahiers de l’assurance que « si l’on a une préférence pour le risque face à la rente, ce qui est mon cas, il faut préférer par exemple la taxation sur la succession aux impôts de type impôt de solidarité sur la fortune ». L’idée alors défendue était que l’héritage ne rend pas compte du risque et du mérite, contrairement à l’accumulation du capital par le travail. L’exécutif n’a pourtant pas avancé de réforme en ce sens.

Changement des droits de succession à l’international : une directive à connaître

Affirmer cependant que la question n’a pas connu d’actualité récente serait erroné. Tout d’abord en matière de succession internationale, où les règles ont changé le 17 août 2015 dans tous les pays de l’Union européenne à l’exception du Danemark et de l’Irlande. Depuis cette date, l’ensemble de la succession (biens mobiliers et immobiliers) n’est régie que par une seule loi nationale. Il s’agit par défaut de la loi de la résidence habituelle du défunt, mais cela peut aussi être sa loi nationale si la personne a procédé à ce choix avant sa mort. La loi applicable doit être désignée explicitement dans le cadre de dispositions de dernières volontés, notamment d’un testament. Par exemple, la succession d’une Française installée en Italie sera régie par la loi italienne pour l’ensemble de ses biens, où qu’ils soient, si elle n’a pas désigné la loi française pour régir sa succession. Il faut noter que le règlement a une portée universelle, la loi de la résidence habituelle pouvant être celle d’un État non partie au règlement européen. Enfin, elle concerne aussi les ressortissants non européens résidents dans un des pays de l’Union européenne.

« La valorisation sociale à travers l’entreprise a du mal à faire son chemin dans les esprits en France »

 Cependant, le règlement ne régit que les aspects de droit civil. La fiscalité successorale n’est pas touchée par le règlement européen, elle reste très complexe et régie en fonction des conventions bilatérales signées par la France et les autres États. En l’absence d’accord, l’État où était domicilié le défunt dispose du droit de taxer les biens présents dans le patrimoine du défunt au jour du décès. Néanmoins, la France conserve le droit d’imposer les biens situés sur son territoire. Il en va de même si les héritiers ou les légataires sont domiciliés en France. Pour cela, il est nécessaire qu’ils aient été domiciliés en France pendant au moins six années au cours des dix dernières années précédant la transmission. Cela peut aboutir à des situations où le patrimoine du défunt est taxé dans deux pays.

La transmission familiale d’entreprise : une réalité méconnue

Une autre nouveauté vient des conclusions de L’Observatoire BPCE à la suite de plusieurs études menées entre 2011 et 2016 auprès de dirigeants de PME sur la transmission intrafamiliale. Réputée peu répandue en France, elle joue pourtant un rôle décisif dans la transmission en fin d’activité professionnelle de PME de taille moyenne, principalement dans l’industrie, le BTP et le commerce. On recense plus de 10 000 transmissions familiales par an, soit environ 17 % des cessions. La pratique est freinée par la nécessité de vendre pour assurer ses revenus futurs et par la difficulté de préserver l’équité entre les héritiers, mais la raison principale (qui représente un cas sur deux) est l’absence de repreneur potentiel dans la famille. Et l’obstacle est avant tout d’ordre culturel : « La valorisation sociale à travers l’entreprise a du mal à faire son chemin dans les esprits en France », affirme Alain Tourdjman, directeur des Études économiques de la prospective chez BPCE. Du point de vue du marché, cette mentalité est regrettable puisque le taux de survie et le taux de croissance sont toujours supérieurs (de 6 % à 22 % en fonction de la taille de l’entreprise) dans le cas de transmissions familiales.

Tanguy Warsmann

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