Family-Office basé à Tours, G Consult Finances conseille principalement des chefs d’entreprise et des professionnels libéraux de santé sur leurs problématiques patrimoniales. Son fondateur, Yann Galet, nous présente le positionnement de son cabinet, qu’il considère comme une mission de vie professionnelle. Explications.

DÉCIDEURS. Quel regard portez-vous sur l’investissement socialement responsable ?

Yann Galet. À mon sens, la dimension écologique de l’investissement socialement responsable est illusoire. La finance n’évolue pas comme elle le prétend et elle recourt à l’ISR surtout comme un outil marketing. Cela étant dit, en tant que cabinet indépendant, nous avons des missions. La notion d’ "entreprise à mission" se développe et est désormais inscrite dans le Code civil et le code de commerce à travers la "raison d’être" ou la "société à mission".

"La finance n’évolue pas comme elle le prétend et elle recourt à l’ISR surtout comme un outil marketing"

Quelle place faites-vous à l’ISR ?

L’ISR part d’une bonne intention et suivre ce courant dans le futur nous conduira certainement vers des résultats pertinents. Cependant, nous n’éprouvons pas le besoin de proposer des fonds à impact car nos clients créent leurs propres fondations ou soutiennent des associations ou des ONG qui leur tiennent à cœur. Lorsqu’il s’agit de promouvoir une œuvre qui correspond à ses valeurs, autant le faire à travers des dons.

Est-ce un facteur de performance ?

L’aspect environnemental est un critère malheureusement souvent secondaire en matière d’investissement. Nous recherchons avant tout la performance et si on peut allier les deux, c’est un point positif. L’écologie deviendra un critère dans une vingtaine d’années, lorsque certaines structures auront un attrait plus fort grâce à leurs avancées ESG. Les jeunes générations ont la volonté d’orienter leur épargne vers des placements pour lesquels ils éprouvent des convictions mais, pour la majorité, ce n’est pas le seul aspect écoresponsable qui pilote l’investissement. Lorsqu’il s’agit de rechercher une performance, on s’oriente vers des marchés actions dynamiques sélectionnés en raison de leurs résultats. Le fait que les fonds soient labellisés constitue un plus.

Concrètement, quelles actions mettez-vous en place ?

En tant qu’indépendant, je suis amené à former des salariés et, avant d’exercer ma profession de Family Officer, j’étais formateur de conseillers financiers indépendants. Après vingt et un ans de carrière, je considère qu’on ne peut se limiter au terme d’entreprise à mission ou labellisée car notre profession va bien audelà. Nous avons également un objectif pédagogique auprès de nos clients qui consiste à les éclairer sur les stratégies qu’ils s’apprêtent à déployer afin qu’ils maitrisent les bases de ces schémas et comprennent notre rôle. Nous leur donnons les clés pour qu’ils soient les plus armés et qu’ils aient conscience de l’importance des prises de décisions. Finalement, la mission du CGP est d’informer son entourage, tant ses collaborateurs que ses clients. C’est peut-être ça l’objectif de notre profession : s’engager pour les familles que nous conseillons. 

"Notre objectif est de transmettre un savoir pour informer et protéger nos clients"

Entreprise à mission ou bien mission de vie professionnelle ?

Mission de vie professionnelle ! Quel que soit l’endroit dans lequel nous travaillons (une entreprise à mission, une entreprise labellisée ou non), notre objectif est de transmettre un savoir pour informer et protéger nos clients. Cette connaissance leur permet d’être plus conscients et ambitieux et, au bout du compte, nous mandater pour des services plus complexes. Nous montons ainsi en compétences en suivant une clientèle mieux instruite et en l’accompagnant sur des sujets ambitieux. Notre rôle s’étend au-delà de nos contrats et peut toucher une population plus large, notamment par le biais de l’interprofessionnalité et des échanges qu’elle induit. Par exemple, comme vous le savez, j’ai formé une centaine de professionnels en gestion de patrimoine durant ma carrière, et au moins 50 d’entre eux sont toujours de bons professionnels en exercice. Bien que n’étant pas membre du cabinet ils appliquent auprès de leurs clients les pratiques que je leur ai inculquées et conserve le même ADN, quels que soient les labels ISR, ESG, ou entreprise à mission, des sociétés pour lesquels ils travaillent aujourd’hui. Ainsi l’impact d’un professionnel formateur va bénéficier à des milliers de familles même si son entreprise ne compte qu’une centaine de familles accompagnées. Nous parlons donc de mission de vie professionnelle individuelle et non d’entreprise à mission, labellisée ou non ! 

"Il existe bientôt autant de labels "green" que de sociétés ayant besoin de se peindre en vert"

Devenir une entreprise à mission ne permet-il pas d’attribuer des valeurs fortes à la société ?

Il n’est pas possible, à mon sens, de coder tout cela à travers un label. La dérive sur les labels est déjà là car il existe bientôt autant de labels "green" que de sociétés ayant besoin de se peindre en vert... Même sans ceux-ci, on peut suivre individuellement une mission tout au long de sa carrière et adapter son approche aux entreprises dans lesquelles on travaille. En réalité, la structure, par son écosystème, entraînera des répercussions sur les valeurs de ses collaborateurs, qui bénéficieront à d’autres entreprises par la suite.

"On ne peut se limiter au terme d’entreprise à mission car notre profession va bien au-delà"

La société, en tant que telle, doit avoir sa personnalité et respecter ses engagements et ses valeurs. Pour finir je paraphraserais Nicolas Hulot lorsqu’il cite : "L’écologie est un problème culturel, le respect de l’environnement passe par un grand nombre de changements comportementaux individuels."Il me semble que si l’on veut que la finance devienne plus responsable ou à impact nous devons plus compter sur nos décisions personnelles dans notre application professionnelle que sur les orientations marketing des institutionnels de cette industrie. Cela commence dans les simples choix que nous faisons en tant qu’investisseur, consommateur, contribuable et citoyen ! 

Propos recueillis par Juliette Woods

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