Des infrastructures au private equity, en passant par les SCPI, l'immobilier et désormais les cryptoactifs, Anthony Calci, fondateur du cabinet de conseil en gestion de patrimoine Calci Patrimoine, explique comment il s'est adapté à la période d'incertitude actuelle, et partage son avis tranché sur les notions de CGP et de multi-family office.

 

Décideurs. Quelles ont été vos principales avancées ces douze derniers mois ?

Anthony Calci. Nous sommes désormais trois conseillers pour accompagner nos clients, avec Mathilde Valat et Aude Durand. Aujourd’hui, cela tourne bien et on peut dire que c’est un succès. Évidemment, la collecte a été au rendez-vous. Je dirais que deux pierres se sont renforcées, auxquelles est venue s’ajouter une troisième : nous sommes toujours plus spécialisés en expatriés non-résidents, ainsi que du côté des chefs d'entreprise où nous sommes très sollicités sur les questions d’apport-cession. Enfin, le nouvel enjeu est de proposer aux clients des cryptoactifs

Pouvez-vous nous en dire plus...

Au début de l’année, il n’y avait pas encore de solutions pour un CIF-CGP qui souhaitait proposer des cryptoactifs à ses clients dans un cadre réglementaire sécurisé. Nous ne pouvions ainsi qu’évoquer l’existence de stratégies lors d’un entretien, sans pouvoir en mettre en place. Aujourd’hui, nous avons eu l’aval de l’Anacofi via l’AMF, de notre RC professionnelle et de notre groupement Magnacarta. Les documents et les procédures à mettre en place sont désormais établis, comme les modèles de rapport de mission et les conventions de partenariat avec les entreprises qui ont l'enregistrement de PSAN (prestataire de services sur actifs numériques). Nous sommes aujourd’hui un cabinet de gestion de patrimoine à même de sélectionner et de proposer le meilleur de l’investissement en cryptoactifs via nos partenaires PSAN.

Qu’entendez-vous par l'aval de l’Anacofi ?

Comme pour les titres vifs, un CGP n’a pas le droit de conseiller directement des bitcoins, des cryptomonnaies ou des NFT, soyons clairs. Nous pouvons, en revanche, les intégrer dans une stratégie patrimoniale et mettre en relation nos clients avec un ou plusieurs PSAN pour choisir ensemble l’offre la plus adaptée : gestion sous mandat, investissement progressif, stacking et lending, livret stable coins... De la même manière que toute autre solution d’investisse[1]ment préconisée, nous percevons une commission du PSAN pour rémunérer notre conseil et notre accompagnement, en toute transparence et sans surcoût pour le client.

Est-ce une demande forte des clients ?

Les clients en sont globalement encore peu friands, mais ils apprécient que l’on parle du sujet ensemble et cela génère des échanges intéressants. Puisque c’est encore nouveau pour eux, j’ai remarqué qu’ils seraient prêts à franchir le pas s’ils pouvaient être accompagnés par leur conseiller. Les cryptoactifs vont devenir incontournables dans les patrimoines. D’ici un an, je pense que l’offre en cryptoactifs à travers les CGP se sera fortement démocratisée. Nous devons prendre la mesure de la révolution technologique de la blockchain, du bitcoin, de la finance décentralisée et des cryptoactifs pour pouvoir les positionner aux côtés des classes d’actifs traditionnelles.

Qu’en est-il du private equity ?

Le private equity n’est pas nouveau, mais actuellement en pleine démocratisation. Nous avons d’ailleurs plus collecté en private equity qu’en assurance vie en 2022. Nous avons désormais une expérience d'une dizaine d'années sur les stratégies qui ont fonctionné ou non, nous connaissons les sociétés de gestion et restons toujours en veille.

Quelle est la frontière entre un CGP et un multi-family office ?

Il n’y a pas de différence, c’est de la communication. Je suis d’accord pour parler de multi-family office s’il s’agit d’un cabinet qui gère trois familles à 100 millions d’euros chacune. Mais s’il est question de cinquante familles pesant chacune six millions d’euros, cela reste un cabinet de conseil en gestion de patrimoine qui travaille de la même manière avec des avocats, des notaires et des experts-comptables.

"Les CGP ont des parts de marché à gagner ensemble, particulièrement du côté des banques"

À partir d’une certaine taille de patrimoine, la famille peut se payer son propre cabinet de CGP, qu’elle peut salarier et donc constituer son propre family office. Le seul statut CIF régit la profession. Je trouve cela dommage que tous les cabinets ne se présentent pas comme CGP. Cela nous aiderait tous et profiterait à la profession, car il y a des parts de marché à gagner ensemble, particulièrement du côté des banques.

Quels sont vos projets ?

Le vrai enjeu, ce sont les actifs numériques : nous souhaitons nous renforcer et continuer d’accompagner nos clients sur ce terrain. Nous avons par ailleurs une croissance organique forte grâce à notre méthode moderne de communication : articles, webinaires, positionnement innovant. Le numérique est notre allié, le papier doit être proscrit.

Quelle est votre approche en matière d’immobilier ?

Certains de nos clients ont dépassé le stade de constituer un patrimoine immobilier. Nous travaillons cependant sur deux stratégies : dans l’ancien en faisant appel à des chasseurs, et dans le neuf ou l’ancien réhabilité via les promoteurs. Ce ne sont pas les mêmes localisations, pas les mêmes stratégies. Dans le neuf nous allons sur du haut de gamme, de la qualité sans chercher le rendement à tout prix. Dans l’ancien, l’idée repose sur la constitution de patrimoine par le crédit, en enchaînant les biens dans les villes de taille moyenne avec un peu plus de rendement, et avec peut-être des plus-values à terme. Les SCPI internationales, qui investissent à l’étranger, font par ailleurs partie de notre stratégie cœur. Nous privilégions les SCPI 100 % internationales qui ont été lancées en 2020 et 2021 pour éviter qu’elles aient un passif Covid.

"Le rapport rendement-risque sur les anciennes SCPI composées de bureaux obsolètes n’est plus attractif"

Nous pensons qu’il vaut mieux avoir des foncières nouvelles, des immeubles aux dernières normes, plutôt que des actifs de bureaux qui ont dix ou vingt ans et qui dans quelques années vont voir leurs locataires peut-être ne pas renouveler leur bail... Le rapport rende[1]ment-risque sur les anciennes SCPI composées de bureaux obsolètes n’est plus attractif. Le problème est que nous sommes confrontés d’une part au marteau de l’imposition des revenus fonciers, qui est lourde et qui réduit les rendements, et d’autre part à un risque accru sur les bureaux. Il ne faut pas nécessairement liquider toutes ses SCPI ou SCI mais, pour certains clients trop exposés, arbitrer sur les SCPI diversifiées plus récentes.

Est-ce facile de vendre des parts de SCPI ?

Je suis assez surpris du temps nécessaire à revendre des parts sur quelques-unes des plus anciennes SCPI, les clients d’autant plus. Certaines de ces SCPI ont en effet un problème de liquidité, mais cela ne se sait pas encore. Néanmoins, il s’agit toujours d’un outil patrimonial puissant pour créer des revenus immobiliers

Les marchés sont particulièrement chahutés… Comment conseillez-vous vos clients dans cette période d’incertitude économique et géopolitique ?

Nous contactons nos clients un par un pour voir comment mieux les sécuriser, ou comment les positionner sur des actifs pertinents, comme sur les actions ou les cryptoactifs qui ont subi une forte baisse. Cependant, puisque nous sommes très présents sur le non-coté, nous subissons beaucoup moins ces variations de court terme

"Les fonds non cotés composés d’infrastructures sont nos stratégies privilégiées pour protéger nos clients des incertitudes actuelles"

Nous restons globalement très prudents, car nous pensons que le risque de stagflation est important. Les fonds non cotés composés d’infrastructures sont nos stratégies privilégiées pour protéger nos clients des incertitudes actuelles.

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