Sujet phare cette année, l’énergie est sur toutes les lèvres et au coeur de toutes les réflexions. Mais la hausse des prix pourrait devenir une opportunité pour les investisseurs souhaitant se tourner vers les actifs énergétiques à mi-chemin entre le private equity et l’infrastructure.
DÉCIDEURS. Pouvez-vous nous faire le point sur les marchés ?
Lionel Le Maux. Vous avez une situation où les taux d’intérêt montent en raison essentiellement du prix de l’énergie, ce qui a entraîné de l’inflation provoquant des effets non négligeables sur les actifs énergétiques : pour se mettre en capacité de compenser ce phénomène il va falloir se concentrer sur des actifs très opérationnels.
 
Comment se sont comportés les actifs énergétiques ?
Si nous examinons le marché actuel, une première phase d’actifs de transition énergétique 1.0, c’est-à-dire solaire au sol et éolien on shore, ont vu leurs coûts de production descendre progressivement. Sur cette même période, les taux ont également baissé, ce qui a conduit à une accélération du développement de ces actifs et des infrastructures, et les TRI projets ont diminué en raison de l’augmentation de la concurrence. Cette faiblesse de rendement s’est révélée être un vrai handicap, d’autant plus que, fondamentalement, ce sont des titres avec des marges Ebidta élevées et donc des leviers opérationnels relativement bas.
 
Quel est l’avenir de ces actifs ?
Nous voyons arriver depuis maintenant quatre ou cinq ans la seconde génération d’actifs, plus petits, diffus et techniques, ces caractéristiques sont celles du biogaz, du solaire en toiture ou de l’hydrogène mobilité. Ces sujets sont à mi-chemin entre le private equity et l’infrastructure, plus complexes mais avec des rendements plus importants. La hausse des taux va les favoriser, d’une part parce qu’ils sont moins matures et plus rentables et d’autre part parce qu’ils sont développés par des sociétés qui sont des promoteurs-développeurs. Cela permet d’appréhender à la fois le TRI du projet mais aussi celui de la plateforme en tant qu’opérateur. Les frontières vont s’estomper entre le capital croissance, le capital développement et l’infrastructure, nécessitant plus de compétences de la part des gérants.
 
Quel impact a l’inflation sur les actions énergétiques ?
Lorsqu’un marché est baissier, peu de choses y résistent. Les flux conduisent les investisseurs à revendre et il est difficile de contrer ce phénomène. En matière d’énergie, nous pouvons distinguer deux typologies d’acteurs : les producteurs d’énergie et les sociétés qui apportent des solutions pour faciliter l’efficacité énergétique. Dans la deuxième catégorie il s’agit essentiellement de valeurs de croissance qui ont souffert de l’inflation (à l’image des valeurs technologiques). Dans la première catégorie l’impact de l’inflation est moins marqué à la fois parce qu’il est possible de vendre de l’énergie plus cher et parce qu’il est possible de se tourner vers des actifs avec plus de leviers opérationnels. Au-delà de l’inflation c’est la volatilité des prix de l’énergie qui est déterminante et va accélérer la prise de décisions de certaines sociétés et des gouvernements.
 
Comment se couvrir face à l’inflation ?
Pour se protéger de l’inflation, il est intéressant de se concentrer à la fois sur des actifs moins matures et plus techniques, ainsi que sur les sociétés qui les développent. Nous pouvons espérer que la hausse des prix de l’énergie engendrera une prime de risque donnant lieu à des prix de base plus élevés que ceux que nous connaissons. De ce fait, les modèles de valorisation dans l’énergie renouvelable prendront en compte des prix plus élevés, avec des modèles plus marchands, plus volatils et plus rentables.
 
Quel est l’intérêt des investisseurs pour ces actifs ?
Les clients investis sur de l’infrastructure pure étaient sur un modèle de tarifs garantis qui s’est affaissé. Les investisseurs comprennent qu’il y a là une nécessité de remonter dans la chaîne de valeur, avec des actifs plus riches d’un point de vue opérationnel.
 
Comment Aqua Asset Management s’est adaptée à ce contexte ?
Nous avons recruté car nous pensons que beaucoup de croissance est à venir et que nos actifs sont précisément de seconde génération, logés dans des entreprises de promoteurs-développeurs.
 
Pouvez-vous nous parler de votre stratégie d’investissement ?
Nous cherchons les deals nous-mêmes, notamment grâce à notre présence au coeur de l’écosystème avec un événement que nous avons créé, le Transition Forum, qui réunit plus de 1 500 personnes chaque année. Cela nous permet de connaître et de sélectionner nos prochains thèmes d’investissement.
 
Quelles thématiques privilégier en 2023 ?
Nous avons la conviction que deux classes d’actifs vont connaître une accélération très forte : le biogaz et le solaire en autoconsommation collective. L’hydrogène continuera de se développer sur 2023 pour aboutir à des projets très concrets d’ici à 2024. 
 
Propos recueillis par Marine Fleury

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