Valérie Pécresse n’y va pas par quatre chemins
« La culture partout et pour tous » était l’un de ses slogans pendant la campagne des régionales. Et la nouvelle présidente de la Région Île-de-France s’était même fendue d’une tribune dans Libération dans laquelle elle prônait l’augmentation de 20 % des crédits alloués à la culture pour contrebalancer le désengagement de l’État. Mais une fois en fonction, Valérie Pécresse semble rattrapée par d’autres promesses d’ordre sécuritaire et des contraintes budgétaires relatives à sa volonté de ne pas augmenter les impôts.
La chasse aux subventions
Et c’est l’accessoire culture qui prend. L’élue LR évoque des « subventions suspectes » accordées sous le mandat précédent afin de justifier les réductions drastiques à venir : 50 millions d’euros. Si son programme prévoyait déjà la fusion d’associations culturelles, Valérie Pécresse et son staff seraient sur le point d’aller plus loin encore en supprimant les subventions accordées à certains espaces culturels, à commencer par celles reçues par le Lieu du design. Une décision qui serait synonyme d’asphyxie pour ce lieu créé en 2009 sous le mandat de son prédécesseur socialiste, Jean-Paul Huchon : il ne pourrait que mettre la clé sous la porte. France info cite de son côté un élu régional évaluant à 100 000 euros annuels les besoins d’une association d’aide aux jeunes en difficulté quand celle-ci a touché un million en trois ans. Et de préciser sur cette même antenne : « On va regarder ça de près, nous n’avons pas d’a priori, c’est peut-être justifié. Mais il y a des dizaines et des dizaines d’associations de ce type financées par la Région, on risque de ne pas être déçus ! » Affaires à suivre.
La pente est rude
Valérie Pécresse est également montée au créneau sur des sujets tout aussi risqués, dont le projet du Grand Paris(1), pourtant si cher à Nicolas Sarkozy. Il est vrai que le président des Républicains n’apparaît plus dans les petits papiers de la chef de file régionale qui avait tout simplement refusé sa venue pendant un meeting de campagne… « Il est encore temps d’abandonner » : alors qu’elle était restée relativement discrète sur le sujet jusqu’à son élection, celle qui a démissionné de son poste de député pour respecter ses engagements de campagne, y va frontalement avec la Société du Grand Paris. L’institution vient pourtant d’élire Patrick Ollier (LR) dans une joyeuse et confortable unanimité politique. Il n’est pas sûr que même la puissante Île-de-France puisse imposer quoi que ce soit à ce niveau. Sa première sortie médiatique sur un projet de dépistage obligatoire de cannabis dans les lycées s’était aussi heurtée à une levée de boucliers des corps enseignant et médical. Sans parler des modalités juridiques : il n’est pas si simple de procéder à ce type de pratiques qui s’apparente à une forme d’obligation de soins. En revanche, son engagement de campagne relatif à la suppression de l’aide au transport pour les sans-papiers a, lui, bel et bien été respecté dès le 21 janvier. Un vote qui avait reçu le soutien notoire des conseillers Front national. Cette aide qui permet aux étrangers en situation irrégulière titulaires de l'AME (Aide médicale d'État), de bénéficier de 75 % de réduction sur leur passe Navigo (70 euros) pourrait faire économiser entre 50 et 70 millions d’euros à la Région. « Une mesure de justice sociale, d'équité et nous l'assumons », selon Stéphane Beaudet (LR), vice-président aux Transports, une stigmatisation insultante pour ses opposants. Une chose est sûre, Valérie Pécresse entre dans le dur avec fermeté, quitte à irriter beaucoup de monde.
Estelle Mastinu et Quentin Lepoutre
(1) À lire sur le Magazine Décideurs, IDF vs MGP