Qu’il est facile de réclamer l’héritage d’un mort. Face à une gauche qui joue la mater dolorosa, feu Michel Rocard doit se retourner dans sa tombe. Il faut dire que le spectacle est grandiose. Tandis que Manuel Valls se dit « orphelin », que Jean-Christophe Cambadélis souffre d’une « douleur immense », le président de la République de son côté, interpelle l’ancien Premier ministre : « Cher Michel Rocard, le combat continue », harangue-t-il, grave, comme s’il évoquait un compagnon de guerre aux Invalides le 7 juillet dernier. On en oublierait presque que les ambitions réformatrices du père fondateur de la « deuxième gauche » se sont brisées contre le radicalisme d’un socialisme archaïque, dont François Hollande fut lui-même le porte-étendard jusqu’en 2012. Fidèle à ses convictions, l’inventeur du RMI et de la CSG ne pouvait tolérer les fausses promesses de l’actuel Président à qui il reprochait d’ailleurs « un excès de dépendance aux médias, typique de la pratique mitterrandienne, dont il est le meilleur élève ». Michel Rocard ne s’est jamais considéré comme un électron libre, mais bien comme un social-démocrate, capable de réunir et de diriger. Impossible donc pour ceux qui, à l’image d'Emmanuel Macron, cherchent à s’émanciper du parti à la rose de revendiquer son héritage. Pas plus que d’autres, comme Manuel Valls, qui en voulant couper les ponts à gauche, brisent son unité. Noyés dans des larmes de crocodile face à la perte de celui qu’ils ont ignoré lorsqu’ils ne l’ont pas méprisé des années durant, les socialistes sont pris la main dans le sac, en flagrant délit de récupération politique.

 

Capucine Coquand

@CapucineCoquand

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