Tops jobs de l’UE : le couple franco-allemand fonctionne toujours
Pour une partie des observateurs, les choses sont claires depuis plusieurs mois : le couple franco-allemand est définitivement en panne. Selon eux, malgré les sourires de façade, les relations entre Emmanuel Macron et Angela Merkel sont définitivement abimées. Pourtant, même si le couple est parfois tumultueux, il reste solide. Le dialogue n’est pas rompu et des solutions finissent par être trouvées. La désignation des dirigeants de l’Union européenne en est la preuve flagrante. En dépit de divergences de fond, les deux principales puissances ont trouvé, le mardi 2 juillet au soir, un accord qui satisfait pratiquement tout le monde : leurs egos respectifs, leurs intérêts nationaux, les partis politiques européens, les pays membres de l’UE et l’UE elle-même.
Présidence de la Commission : Ursula von der Leyen
La règle est claire : chaque parti politique européen désigne une tête de liste (Spitzenkandidat). S’il arrive en tête, le Spitzenkandidat prend la tête de la Commission européenne. Le PPE, avait depuis plusieurs mois désigné son favori : l’allemand Manfred Weber.
Mais Emmanuel Macron en a fait une affaire personnelle : tout sauf Weber. Pour le président Français, il était impensable de nommer à la tête de la Commission une personnalité qui n’a jamais exercé de fonctions ministérielles au niveau national et qui, de surcroît, n’est pas francophone. Du côté d’Angela Merkel, il était indispensable de soutenir jusqu’au bout un candidat allemand membre de la CDU-CSU.
Emmanuel Macron a obtenu la tête de Manfred Weber, ce qui prouve que sa voix pèse dans l'UE
Finalement, une solution a été trouvé : Ursula von der Leyen, ministre allemande de la Défense depuis 2013 prend la tête de la Commission. Tout le monde y trouve son compte. Emmanuel Macron a obtenu la tête de Manfred Weber, ce qui prouve que son avis pèse dans l’Union européenne. Satisfaction supplémentaire pour lui, Ursula von der Leyen, qui a passé son enfance à Bruxelles, parle parfaitement la langue de Molière. Autre atout, l'allemande est une fervente partisane d'une défense européenne, thématique prioritaire pour la France.
Angela Merkel, de son côté, sauve la face. La présidence est occupée par une allemande membre de son parti, comme prévu initialement. Ce qui contente également le PPE qui aurait pu voir ce poste prestigieux lui échapper au profit des libéraux ou des socialistes.
Banque centrale européenne : Christine Lagarde
Depuis son élection, Emmanuel Macron l’affirme régulièrement : il y a trop peu de Français dans les instances dirigeantes de l’Union européenne. Dans le cadre de sa stratégie d’influence, il était primordial de voir un compatriote occuper un top job. C’est chose faite puisque Christine Lagarde prend la tête de la Banque centrale européenne. Première femme à la tête du ministère des Finances, première femme à la tête du FMI, elle devient également la première femme à la tête de la BCE. Même si, à l’inverse de ses prédécesseurs, elle n’a jamais dirigé de Banque nationale, ses compétences ont fait l’unanimité. De son côté, Angela Merkel est rassurée de voir une personne compétente à ce poste. Son cauchemar : voir un « anti-austérité » occuper le poste ne s’est pas réalisé.
Conseil européen : Charles Michel
Les libéraux comptent parmi les grands vainqueurs des élections européennes. Bien décidés à obtenir un top job, ils obtiennent gain de cause. Si Margrethe Vestager ne décroche pas le poste de présidente de la Commission européenne, le belge Charles Michel est le successeur de Donald Tusk à la tête du Conseil européen.
Ce poste nécessite une dimension internationale et une capacité à négocier. Cela tombe bien, Charles Michel possède ces deux qualités. Premier ministre belge de 2014 à décembre 2018, il a dirigé un gouvernement dans lequel cohabitaient nationalistes flamands et libéraux francophones. Une alliance de la carpe et du lapin qui a fonctionné plusieurs années. Ce proche d’Emmanuel Macron est également apprécié du PPE et du PSE pour ses capacités d’écoute et son ouverture d’esprit. Une fois encore, il s’agit d’une nomination qui contente tous les pays membres.
Haut représentant pour les affaires étrangères et la Politique de sécurité
Pour respecter les équilibres politiques et géographiques de l’UE, il était conseillé de désigner à un top job un membre du PSE et une personne originaire du sud de l’union. C’est chose faite. Le socialiste espagnol Josep Borrell, 72 ans succède à l’italienne Federica Mogherini. Josep Borrell a une fine connaissance de la diplomatie puisqu’il occupait le poste de ministre des Affaires étrangères de l’Espagne. Il a également présidé le Parlement européen de 2004 à 2007.
Lucas Jakubowicz