Jean-François Lahitte (BCD Travel) : « Après six mois de télétravail, personne ne voulait revenir en arrière »
Décideurs. Chez BCD Travel, 40 % des salariés télétravaillent. Pourquoi une telle politique ? Comment cela s’organise-t-il ?
Jean-François Lahitte. Lorsque je suis arrivé en 2008, il y avait déjà des cadres en télétravail. Ils étaient autonomes et ça marchait bien. Les agents de réservation étaient également intéressés par ce mode de fonctionnement, mais les contraintes techniques et les règles de sécurité ne le permettaient pas. C’est malgré tout quelque chose que je tenais à mettre en place : les arrêts maladie étaient assez nombreux et beaucoup des salariés vivent à plus d’une heure de transport de nos locaux. Par ailleurs, nous devions déménager et il était plus économique de choisir une surface plus petite et au centre de Paris. J’ai donc pensé que cela pourrait être une solution. J’ai mené une enquête afin de connaître le nombre de collaborateurs intéressés puis discuté avec le CHSCT qui a insisté sur l’importance pour les télétravailleurs de garder un lien avec leurs collègues. Il a donc été décidé qu’ils viendraient une fois par semaine au bureau. Après six mois, une nouvelle enquête a été réalisée et personne ne voulait revenir en arrière ! Le seul point d’alerte a été formulé par le management, inquiet de ne plus voir ses équipes quotidiennement. Nous leur avons donc délivré une formation. Le nombre d’arrêts maladie a diminué de 17 %. C’est un succès ! Nous avons donc élargi le dispositif et proposé le télétravail à nos équipes de Montpellier. Sur 80 personnes, 30 ont choisi de travailler depuis leur domicile. Nous pouvons estimer je crois que cette politique correspond à leurs attentes.
Comment se sont déroulées les négociations avec les partenaires sociaux pour la mise en place de cette mesure ?
Nous n’avons pas eu d’accord d’entreprise avec notre délégation syndicale puisque le télétravail avait déjà été mis en place pour les cadres. Nous avons simplement discuté avec le CHSCT qui s’inquiétait de l’isolement. Nous avons également dû remettre une circulaire expliquant comment télétravailler, l’importance des pauses… Nous nous sommes aperçus que les salariés sont plus productifs au début, puis que leur rythme redevient identique à celui qu’ils avaient au bureau après six mois.
Depuis sa mise en place, avez-vous été amené à réaliser des ajustements ?
Non pas vraiment. La question qui se pose aujourd’hui est plutôt de savoir si un jour par semaine au bureau est nécessaire. Nos collaborateurs envisagent plutôt d’être présents une fois tous les quinze jours. Il faut également surveiller les éventuelles dérives. Un autre point sur lequel nous devons veiller est le sentiment de perte de pouvoir d’un manager, dû à la distance avec ses équipes. Pour l’instant je n’y ai jamais été confronté, mais pour la prévenir, nous avons un système de messagerie instantanée et le téléphone évidemment. En somme, il faut même être plus présent !
Propos recueillis par Roxane Croisier