Toyota Motor Manufacturing France a investi plus d’un milliard d’euros dans l'usine d'Onnaing près de Valenciennes depuis 2001. Le site du constructeur japonais s’inscrit dans l’ère de l’industrie 4.0. David Fillon, directeur des opérations industrielles, nous livre les secrets de « l’usine du futur ».
D.Fillon (Toyota) : « Les technologies vont contribuer au développement des personnes »
Décideurs. Quelle place est réservée à la transformation digitale chez Toyota ?
David Fillon. À l’avenir, Toyota ne se positionnera plus seulement comme un constructeur automobile mais comme un fournisseur de mobilité. Les voitures sont de plus en plus connectées, autonomes et embarquent des technologies de partage de données. La part des revenus du groupe provenant des automobiles digitalisées est appelée à croître. Ce concept de fournisseur de mobilité par le biais des nouvelles technologies est donc un élément clé dans la stratégie de l’entreprise. Mais, la digitalisation de l'usine ne se fera que si l'ensemble des collaborateurs est au coeur de l'amélioration des processus.
À quoi ressemble l’usine du futur chez Toyota ?
L’usine du futur, c’est d’abord une usine Lean Manufacturing. La priorité est donc donnée à l’accès à l’information. Les technologies utilisées dans les automobiles sont de plus en plus complexes et les flux d’information considérables. La charge cognitive qui en résulte pour les collaborateurs est donc particulièrement importante. Nous avons ainsi mis à disposition des tablettes sur lesquelles on peut visualiser, pour chaque véhicule, et en temps réel, la pièce à monter. Ce processus, historiquement opéré sur papier, permet de réduire le stress inhérent à une recherche complexe grâce à plus de lisibilité. Enfin, avec les écrans tactiles, la collecte d’information est instantanée grâce aux bases de données qui permettent de hiérarchiser les problèmes et d’impliquer le collaborateur dans la recherche de solutions. Avec le Big data, nous développons la maintenance prédictive et tirons parti de la salle de pilotage qui monitore l’ensemble des flux opérationnels de l’usine.
« Les personnes ne seront pas cachées derrière les technologies »
Comment accompagner les collaborateurs dans ces changements ?
L’entreprise de demain ne doit pas être une structure vide. Elle doit être un lieu où l’ensemble des collaborateurs adhèrent aux valeurs de Toyota. Historiquement, les collaborateurs doivent être au centre du développement de l’activité. Les personnes ne seront pas cachées derrière les technologies, ce seront les technologies qui vont contribuer au développement des personnes. Il est primordial pour notre usine d’étendre les formations digitales, trop peu présentes dans nos programmes actuellement. L’automatisation prendra une place de plus en plus prépondérante et certains métiers vont se transformer plus que d’autres. Le marché de la maintenance est par exemple sous tension. Plus que réparer la mécanique ou les pannes électriques, le technicien de maintenance doit dorénavant avoir des connaissances en informatique, en gestion des réseaux et maîtriser le pilotage des opérations. C’est pour cela que nous sommes en train de créer « l’école de la maintenance » pour former notamment les agents de production, même si la passerelle entre ces métiers existe déjà.
Ainsi, nous pérennisons l’emploi et assurons le développement de nos salariés. C’est un cercle vertueux qui s’opère. Plus de 300 personnes en CDI seront embauchées dans l’usine d’ici à 2020 et encore plus à l’avenir. Le futur, ce sont nos collaborateurs, le reste, ce sont les outils de notre temps.
Tom Fouan
