N.Roos (L'Oréal): "Former des entrepreneurs capables d'innover"
Décideurs. Real Campus a accueilli sa première promotion en janvier 2019. Pourquoi, en ouvrant cette école dédiée à la coiffure et à l’entreprenariat, L’Oréal décide de franchir le pas de la formation initiale ?
Natalie Roos. Pour tirer l’ensemble de la profession vers le haut. Signe que la filière manque d’attractivité, 10 000 postes de coiffeurs sont aujourd’hui vacants en France. Pour un jeune de 15 ans, devenir coiffeur demeure une lourde décision à prendre, car la profession est insuffisamment valorisée. Or, le nom de L’Oréal fournit une caution incroyable aux étudiants ou aux parents qui hésiteraient à aller à l’encontre de leurs préjugés.
Les enseignements du CAP de coiffure vous paraissent-ils inadaptés ?
La filière se renouvelle très lentement. Mais le bachelor « Coiffure et Entreprenariat » ne concurrence pas directement les CFA puisqu’il se situe à un niveau d’études supérieur. Real Campus s’inspire de l’école hôtelière de Lausanne qui propose un cursus centré autant sur les bonnes pratiques professionnelles que sur les compétences managériales. Plutôt que de combler directement le déficit de coiffeurs, nous souhaitons former de vrais entrepreneurs de la coiffure capables d’innover et de revaloriser le métier.
Qu’entendez-vous par « entrepreneur de la coiffure » ?
Aujourd’hui, un coiffeur ne doit pas juste savoir couper les cheveux, il doit proposer à ses clients une expérience complète, qui mérite que l’on se déplace jusqu’à lui. Pour bâtir ce programme, nous avons travaillé en concertation avec l’Union nationale des entreprises de coiffure (UNEC) ainsi qu’avec le Conseil national des entreprises de coiffure (CNEC). Le bachelor se fonde sur cinq blocs de compétences : la technique, la signature propre à chaque artisan ou à chaque projet, la stratégie marketing, digitale et commerciale, la gestion classique d’un compte d’exploitation adaptée au salon et les ressources humaines. Mais la pédagogie est centrée sur l’expérience client, une approche indispensable pour affronter les grandes transformations induites notamment par l’arrivée du digital.
Quelle réponse apportez-vous à la question de la personnalisation de la formation ?
C’est tout l’enjeu de la prochaine rentrée. Les étudiants de Real Campus présentent des profils divers. Certains sont déjà titulaires d’un brevet professionnel ou du baccalauréat, d’autres se trouvent en situation de reconversion. La personnalisation s’impose. Le cursus commence par un« bootcamp », une formation accélérée aux rudiments techniques du métier pour les étudiants qui n’y ont jamais été initiés, et nous prévoyons prochainement de mettre en place des groupes de niveaux d’anglais. Par ailleurs, tous les projets entrepreneuriaux font l’objet d’un suivi individuel par l’intermédiaire d’un système de parrainage.
Que vous reste-t-il à finaliser pour atteindre votre rythme de croisière ?
L’ensemble du cursus reste à planifier sur les trois ans que dure le bachelor ou sur un format plus court. À plus long terme, nous espérons pouvoir labelliser le programme et permettre à d’autres écoles de le proposer, tout en laissant la certification sous notre responsabilité.
Marianne Fougère