De Franck Riboud à Baudouin Prot en passant par Jean-Paul Herteman, la rentrée 2014 est marquée par une vague de départs sans précédent de grands patrons français.
Sortir par la grande porte, être remercié par ses actionnaires ou encore démissionner, il existe plusieurs façons de tirer sa révérence pour un dirigeant.
Si l’on se réfère à la législation française, le mandat de président du conseil d’administration d’une société anonyme est limité à six ans et renouvelable jusqu’aux 65 ans du président. Au-delà de cet âge, ce dernier ne peut exercer que si les statuts de l’entreprise le spécifient. Pourtant, rares sont les grands patrons à céder leur fauteuil à la date prévue. Les uns allongent leur mandat, les autres l’écourtent, laissant aux administrateurs la charge de nommer un nouveau président sans déstabiliser l’entreprise. Six scénarios pour dire au revoir et trouver un successeur.

Jean-Paul Herteman, sortie sans faute
Au printemps prochain, le P-DG de Safran soufflera ses soixante-cinq bougies et atteindra ainsi la limite d’âge pour diriger son groupe aéronautique. Sage, il a renoncé à faire évoluer les statuts de sa société pour prolonger son mandat et prépare sa succession six mois à l’avance.
Le prétendant. Son nom n’est pas encore connu mais devrait être dévoilé d’ici à fin 2014. Le recrutement pourrait se faire parmi l’équipe dirigeante d’Airbus, de Thales, ou en interne.
Les happy few partis sans faire de vague. Au mois de juillet, Patrick Boissier, P-DG du groupe naval DCNS, avait écourté son mandat de six mois pour passer la barre à Hervé Guillou. L’objectif : engager le groupe sur un nouveau cycle stratégique dans les plus courts délais.

Franck Riboud, faux départ
Le 2 septembre 2014, le conseil d’administration de Danone a mis fin au triumvirat Riboud-Faber-Hours en dissociant les fonctions de président et de directeur général. Mais en quittant l’exécutif du groupe, Franck Riboud ne fait qu’un pas de côté et conserve la présidence du conseil. Réélu tous les trois ans à la tête de Danone depuis 1996, le P-DG n’avait plus que deux mandats devant lui avant d’atteindre 65 ans. Une gouvernance à deux a été instaurée afin de passer la main en douceur.
Le successeur. C’est donc Emmanuel Faber, le bras droit de Franck Riboud depuis 2008, qui devient directeur général.
Les inconditionnels du faux départ. Cette solution parfaite pour une transition sans heurts entre deux directeurs généraux a notamment été adoptée par Air Liquide, Total, Saint-Gobain et Carrefour.

Baudouin Prot, départ prématuré
Cinq mois après le renouvellement de son mandat de trois ans à la tête de BNP Paribas, Baudouin Prot a annoncé sa démission le 23 septembre dernier. Certains collaborateurs évoquent la pression subie pendant la crise de 2008, d’autres parlent du poids du litige avec les États-Unis, affaire soldée cet été par une amende de près de neuf milliards de dollars. À cela s’ajoute des relations tendues avec Jean-Laurent Bonnafé, directeur général depuis 2011.
Le dauphin. C’est Jean Lemierre, ex-conseiller de l’ancien dirigeant de BNP Paribas, Michel Pébereau, puis de Baudouin Prot, qui doit prendre la direction du groupe en décembre 2014.
Les victimes du départ prématuré. En 2009, Daniel Bouton, président de la Société générale, avait remis sa démission suite au scandale de l’affaire Kerviel et aux révélations sur les montants de retraites hors normes des dirigeants du groupe.

Maurice Lévy joue les prolongations
Prêt à tout pour rester P-DG deux ans de plus, Maurice Lévy a modifié les statuts de Publicis. Son mandat arrivait à échéance en 2015. Mais en créant un directoire élargi le 15 septembre dernier, il a obtenu une prolongation de dix-huit mois. Maurice Lévy reste ainsi dans la partie jusqu’en 2017.
Jean-Yves Naouri botte en touche. Découragé par un patron particulièrement tenace depuis sa prise de fonctions en 1987, Jean-Yves Naouri, autrefois pressenti pour lui succéder, a quitté le groupe. La question de la succession se reposera fin 2016.
Les inconditionnels des prolongations. Les dirigeants des groupes de médias sont connus pour leur capacité à rester en selle. Nonce Paolini, Nicolas de Tavernost et Jean-Paul Baudecroux, respectivement P-DG de TF1, M6 et NRJ, ont eux aussi modifié les statuts de leur société pour s’octroyer quelques mandats de plus.

Marc Lelandais, poussé vers la sortie
Le P-DG de Vivarte est sur le point d’être évincé par ses futurs actionnaires. L’objet du désaveu : la restructuration financière du groupe menée par Marc Lelandais depuis sa prise de fonctions en 2012. Le renouvellement de la gouvernance de Vivarte ne pourra pas avoir lieu avant la mi-octobre, date du transfert des actions qui placera le groupe entre les mains d’Oaktree, Alcentra, GoldenTree et Babson, les actionnaires de référence.
La succession. C’est une question que Marc Lelandais ne se pose pas. Le P-DG a bien l’intention de poursuivre la réorientation stratégique de son groupe à terme.
Les victimes du désaveu des actionnaires. Mark Frissora, P-DG de Hertz, a démissionné le 8 septembre 2014. Ses relations avec les actionnaires étaient tendues depuis que l’investisseur Carl Icahn, qui a acquis 8,5 % du groupe, a présenté ses intentions stratégiques pour l’entreprise, différentes de celles préconisées par Mark Frissora.

Pierre Pringuet, place à la famille
Les sept années de Pierre Pringuet à la tête du groupe de spiritueux font figure d’exception. Premier directeur général extérieur à la famille Ricard, il doit partir en retraite en février 2015, date de son soixante-cinquième anniversaire.
L’héritier. Alexandre Ricard, petit-fils du fondateur et directeur général délégué depuis 2012.
Le retour au pouvoir des dynasties familiales. En 2013, les familles historiques des groupes Hermès et Galeries Lafayette ont elles aussi replacé un des leurs à la tête de leur entreprise. Axel Dumas est ainsi devenu gérant d’Hermès et Nicolas Houzé directeur général des Galeries Lafayette.

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