Cinq milliards d’euros. Ce pourrait être le prix déboursé par Capgemini, leader mondial du conseil et des services informatiques, pour s’offrir Altran, champion de la R&D externalisée. Adoubée par la Commission européenne, l’opération permettrait à l’acquéreur de tirer profit de synergies dès 2022.

Le M&A français est loin d’être flamboyant cette année. Selon Refinitiv, le volume des opérations de fusions-acquisitions a même régressé de 31 % depuis janvier pour connaître son niveau le plus bas depuis 2016 (75 Md$). Au cours de ces derniers mois poussifs, quelques deals sont toutefois sortis du lot. Par son montant et son importance stratégique, l’acquisition éventuele d’Altran par Capgemini devrait incontestablement être l’un d’eux. Le nouveau groupe, à l’issue de l’opération, emploiera plus de 250 000 collaborateurs et affichera un chiffre d’affaires de 17 milliards d’euros.

Commun accord

Les conseils d’administration des deux sociétés ont approuvé, à l’unanimité, l’accord portant sur l’OPA amicale lancée par Capgemini au prix de 14 euros par action. Un montant qui représenterait, pour les actionnaires d’Altran, une prime de 33 % sur la moyenne du cours des trois mois précédant l’annonce en juin et valorise la société 12 fois son Ebit, à plus de 5 milliards d’euros. Avec le feu vert des autorités de la concurrence européennes et américaines, le consensus semblerait général et le closing devrait intervenir d’ici à la fin de l’année. Et ce malgré l’irruption du fonds activiste Elliott au capital d’Altran. D’ailleurs, un groupe d’actionnaires mené par le fonds Apax Partners a d’ores et déjà cédé un bloc de 11 % du capital à Capgemini. 

Rapprochement stratégique

Dans un secteur où les donneurs d’ordre, à savoir les très grandes entreprises industrielles, se retrouvent face à un panorama très éclaté de petits acteurs, Altran se distingue avec ses 2,9 milliards d’euros de chiffre d’affaires en 2018 et ses 47 000 employés répartis dans plus de trente pays. Cependant, pour répondre aux attentes toujours plus pointues des grandes firmes, la taille du groupe – à condition que les économies d’échelle et les synergies soient bien présentes – devient un enjeu majeur.


Capgemini espère des  synergies  de coûts et  de modèles opérationnels de 70  à 100 millions d’euros  en trois ans


Cyril Perard, managing director de Perella Weinberg, conseil financier d’Altran sur l’opération, précise : « Cette acquisition résulte d’une convergence croissante et récente entre le monde de l’IT et celui de la R&D. Avec une industrie de la R&D qui n’est pas encore arrivée à maturité, la combinaison avec un géant de l’informatique constitue un tournant stratégique. En tant que leader mondial du secteur, il n’est pas étonnant qu’Altran soit la première entreprise à franchir le pas. »

Le marché américain dans le viseur

Le rapprochement entre le leader mondial du conseil, des services informatiques et de la transformation digitale et le champion des services d’ingénierie et de R&D pourrait réaliser des synergies de coûts et de modèles opérationnels de 70 à 100 millions d’euros en trois ans, ainsi qu’une relution du résultat normalisé par action dépassant les 25 %. « Ce rapprochement permettra à Capgemini de prendre un leadership sur le segment très prometteur de la transformation digitale des entreprises industrielles », confirme Paul Hermelin, PDG de Capgemini. Mais l’opération est également destinée à renforcer les positions du groupe du CAC 40 outre-Atlantique. En effet, Capgemini pourra notamment profiter de l’assise américaine d’Altran qui avait notamment fait main basse sur Aricent, fin 2017, pour 1,7 milliard d’euros. Une fois le rapprochement consolidé, le groupe devrait réaliser 31 % de son activité en Amérique du Nord.

Sandy Andrianabiby

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