Milliardaire parti de rien. La formule convient parfaitement à Mohed Altrad dont la richesse est estimée à 3,5 milliards de dollars, ce qui fait de lui la vingt-cinquième plus grande fortune de France.
Mohed Altrad, le chemin de Damas
Sur les papiers d’identité de Mohed Altrad, 1948 fait office d’année de naissance. Le principal intéressé l’assume, il l’a choisi au doigt mouillé. Personne ne sait exactement quand le roi du BTP a vu le jour.
Une enfance bédouine
Seule certitude, il est le fruit d’un viol que le chef d’une tribu bédouine de Syrie a fait subir à sa mère, bédouine également. Orphelin dès son enfance, il est élevé par sa grand-mère maternelle dans la pauvreté. Cette dernière considère l’école comme une forme de fainéantise et le pousse à un destin de berger. Mohed Altrad ne l’entend pas de cette oreille, il fuit chez un cousin établi à Raqqa.
Sur place, il se fait remarquer par un instituteur qui le soutient dans ses études et l’aide à devenir bachelier. Le régime au pouvoir cherche à occidentaliser le pays et offre des bourses d’études à l’étranger à quelques élèves méritants venus de milieux pauvres. Leur rôle? Incarner « L’Arabe du futur » pour reprendre le titre du célèbre roman graphique de Riad Sattouf. Brillant, Mohed Altrad est choisi pour faire partie de cette future élite.
Premier geek
Avec 200 francs en poche, il prend la direction de Montpellier qui deviendra son port d’attache pour les décennies à venir. En 1972, il y obtient une licence en physique et en mathématiques avant de décrocher en 1980 un doctorat en informatique à Paris VIII. Son parcours académique fait de lui un membre de la première génération de "geeks", ce qui lui permet de devenir ingénieur chez Alcatel, Thomson et Adnoc (compagnie pétrolière d’Abu Dhabi). Après plusieurs années d’activité, il choisit de se lancer dans l’entrepreneuriat. Une décision qui va changer sa vie.
En 1985, il reprend Mefran, TPE de l'Hérault spécialisée dans les échafaudages. Quarante ans plus tard, le groupe est une multinationale de plus de 60 000 salariés
Construction d’un destin
En 1985, il reprend Mefran, TPE de l’Hérault spécialisée dans les échafaudages. Il la restructure, la renomme Groupe Altrad puis part à la conquête du monde. Sa spécialité est sans doute l’acquisition sur tous les continents de concurrents prospères qu’il intègre pleinement dans le groupe. Entre 2015 et 2017, Altrad va notamment tripler de taille en acquérant trois mastodontes européens du service industriel (le néerlandais Hertel, le français Prezioso et le britannique Cape plc). Aujourd’hui, le groupe Altrad compte plus de 60 000 salariés et se définit comme "fournisseur de prestation de services à l’industrie, proposant des solutions à haute valeur ajoutée, principalement dans les secteurs du pétrole et du gaz, de l’énergie, de la production d’électricité, des procédés, de l’environnement et de la construction. Le groupe est également un leader dans la fabrication d’équipements dédiés au marché de la construction et du bâtiment".
Passion rugby
En dehors de son travail, Mohed Altrad a trouvé un nouveau terrain de jeu: le rugby. En 2011, sur proposition de la maire de Montpellier Hélène Mandroux, séduite par sa rigueur, il devient actionnaire majoritaire et président du club de Montpellier. Le ballon ovale deviendra peu à peu sa passion et un outil de promotion pour son groupe qui est également sponsor du maillot du XV de France et, depuis peu, des All Blacks néo-zélandais.
Lucas Jakubowicz