Conseillers et hauts-fonctionnaires : jeunes, peu connus mais puissants

Adrienne Brotons, la porte-voix

Fervente lectrice de Victor Hugo et d’Albert Camus, Adrienne Brotons est dotée d’une sensibilité sociale qu’elle met à profit dans le privé comme dans le public. À sa sortie de l’ENA (promotion Jean-Jacques Rousseau), cette diplômée de Sciences Po intègre l’inspection générale des Finances où elle mène des missions d’évaluation des politiques publiques aux côtés de Jacques Attali et Louis Gallois. Elle entre en 2015 à l’Élysée où elle est nommée conseillère numérique et macroéconomique du président de la République. À la fin du quinquennat de François Hollande, celle qui se passionne pour les défis liés à la transformation de l’appareil productif français rejoint Renault. Elle y a notamment été directrice des projets mobilité, puis adjointe pour le véhicule autonome au sein de l’Alliance Renault-Nissan. Depuis 2021, elle était directrice des partenariats d’innovation. Engagée à gauche, elle participe avec Laurent Joffrin au lancement du mouvement social-démocrate Les Engagé.e.s. Depuis juillet 2022, elle est directrice du cabinet de ministre de l’Industrie, Roland Lescure. 

Augustin Cellard, l’efficace

Discret, Augustin Cellard n’en mène pas moins sa barque avec brio. Depuis l’été 2021, il fait partie de la garde rapprochée de Bruno Le Maire, pour qui il exerce à Bercy en tant que chef de cabinet. Le trentenaire affiche un parcours sans faute dans la haute fonction publique. Après être passé par les bancs de Normale Sup Lyon et Sciences Po, cet agrégé d’Histoire intègre l’ENA (promotion Winston Churchill). À sa sortie, il est affecté au ministère de l’Intérieur où il travaille aux côtés du chef du bureau des élections et des études politiques. Il est nommé directeur de cabinet de la préfète de Bretagne de 2018 à 2020, période qui sera marquée par la crise des gilets jaunes, le G7 des ministres des Affaires étrangères à Dinard et le premier confinement. Avant d’arriver à Bercy, Augustin Cellard travaillait au secrétariat général du ministère des Armées.

Julia Clavel, la courroie de transmission

Elle partage son temps entre l’Élysée et Matignon. Conseillère PME, consommation, tourisme, économie responsable et régulation du numérique pour le Président et la Première ministre, Julia Clavel passe d’un bâtiment à un autre pour jongler entre les différents sujets qui relèvent de son portefeuille. De la loi visant à sécuriser et réguler l’espace numérique à la problématique de l’inflation alimentaire, en passant par l’organisation de l’exposition Fabriqué en France, son poste nécessite une gymnastique intellectuelle à toute épreuve. Pour servir au mieux l’État, elle peut compter sur son expérience dans le public comme dans le privé où elle a œuvré sur les questions de stratégie chez Saint-Gobain de 2018 à 2020. Julia Clavel a fait la rencontre d’Emmanuel Macron lors d’un stage à Bercy. Elle rejoint ensuite la Banque de France et participe à la campagne du futur président. À la suite des élections de 2017, elle devient conseillère parlementaire du groupe LREM et joue les courroies de transmission entre le gouvernement et les députés à une époque où la chambre basse venait d’accueillir bon nombre d’élus issus de la société civile qui ne maîtrisaient pas encore les arcanes politiques.

Anastasia Colosimo, la théologienne de l’Elysée

Lorsque l’on est président de la République, chaque mot doit être pesé au trébuchet. Notamment lorsque l’on s’adresse aux pays étrangers dans un contexte international tendu fait de guerre en Ukraine, de tensions sino-américaines, de perte d’influence en Afrique. Pour faire passer ses messages, Emmanuel Macron et sa "pensée complexe" peuvent compter depuis janvier 2023 sur une nouvelle conseillère presse internationale, Anastasia Colosimo. Née en 1990, citoyenne française, russe et américaine, elle possède déjà une grande expérience des « grands de ce monde » puisqu’elle a fait ses armes à New York dans le prestigieux cabinet de conseil en communication Richard Attias & Associates où son professionnalisme a fait l’unanimité. En plus d’être une spécialiste de relations presse, elle possède un parcours intellectuel brillant pour son âge : docteur en sciences politiques, enseignante en théologie politique à Sciences Po et essayiste. Celle qui défend sans relâche la liberté d’expression (et critique les lois mémorielles) a été récompensée en 2016 par le prix Elina et Louis Pauwels pour son essai Les bûchers de la liberté.

Certains comme Matthieu Landon ou Julia Clavel conseillent l'Elysée "et en même temps" Matignon

Matthieu Landon, le productif

Emmanuel Macron a fait de la réindustrialisation de la France l’un de ses combats. Pour travailler sur les dossiers au quotidien, le Président est entouré de conseillers qu’il partage, en partie, avec Matignon. Parmi eux, Matthieu Landon travaille sur les questions d’industrie, de recherche, d’innovation et de numérique depuis 2020. Le trentenaire, connu pour être un bourreau de travail, a participé à la conception des plans France Relance (100 milliards d’euros) et France 2030 (54 milliards) dont il suit la mise en œuvre. Il planche également sur la loi de programmation pour la recherche et la politique en faveur des start-up ou des programmes d’investissements d’avenir. Cet ingénieur X-Mines titulaire d’un doctorat en biologie de Harvard œuvrait auparavant au sein de la Direction générale des entreprises où il s’est intéressé plus de trois ans à l’innovation. Une spécialité qui lui a permis de devenir codirecteur de la French Tech pour laquelle il a participé au recrutement de Clara Chappaz.

Antoine Pellion, le planificateur

Né dans le Perche d’un père pharmacien au sein d’une fratrie de quatre enfants, Antoine Pellion se destinait à l’aviation. Trahi par une myopie, le jeune homme voit ses rêves s’envoler à mesure que sa vue baisse. Il devient ingénieur des Mines et se spécialise dans les questions climatiques et énergétiques. Il passe notamment un an sur le chantier de l’EPR de Finlande. Mais ce qui l’attire avant tout, c’est l’appareil d’État, qu’il écume en tant que conseiller de Ségolène Royal, d’Élisabeth Borne puis d’Emmanuel Macron. Il s’attelle aux dossiers brûlants de la réforme de la SNCF ou de Notre-Dame-des-Landes. Ce techno, pronucléaire assumé, que l’on définit comme écolo-pragmatique, pilote donc aujourd’hui le secrétariat général à la planification. Ses fonctions : coordonner les stratégies nationales en matière de transition écologique, veiller à leur mise en œuvre, les évaluer et s’assurer de la cohérence de l’ensemble des politiques publiques avec les objectifs climatiques. En clair, Antoine Pellion, qui définit son secrétariat général comme "l’aiguillon de la crédibilité", est l’empêcheur de polluer en rond des ministères. Un rôle de l’ombre pour un espoir politique dont il se murmure qu’il ne rechignerait pas à prendre demain davantage la lumière.

Morgane Weill, la bonne distribution

Les sujets suivis par Morgane Weill, directrice adjointe du cabinet de Bruno Le Maire, sont au cœur de l’actualité. Sur son bureau ? Des dossiers européens et internationaux comme le pacte de stabilité et de croissance, d’autres liés aux entreprises tels que les aides énergie ou ceux relatifs au numérique, comme le cloud. Depuis janvier, elle pilote également le projet de loi relatif à l’industrie verte. Celle qui a vécu son adolescence en Angleterre et aux États-Unis est passée par les bancs de Sciences Po et de l’ENA. Après avoir fait ses gammes pendant cinq ans au sein de la prestigieuse inspection des Finances, elle rejoint Carrefour en 2018. Elle y sera directrice de cabinet du PDG Alexandre Bompard avant de devenir membre du comité exécutif, directrice de la stratégie, poste où elle travaillera sur la problématique de la transition alimentaire. En 2021, elle devient la plus jeune directrice des supermarchés Carrefour en France. Elle s’est attachée à restructurer l’organisation et à accélérer la franchisation.

Olivia Vignaud, Antoine Morlighem